Bien avant LeBron James et Lionel Messi, le plus grand nom du sport était Jacques de Lalaing. En tant que chevalier errant médiéval, Jacques a participé à des tournois organisés par la royauté, remportant des titres et de la richesse et l’attention des dames. Invaincu en combat singulier et en groupe, il a dominé 15e siècle de joutes à tel point que ses triomphes sont célébrés dans une biographie posthume richement enluminée.
Le Livre des Actes de Jacques de Laliang est l’un des quinze manuscrits médiévaux extraordinaires actuellement à l’affiche au Getty Center à Los Angeles, inclus dans une exposition sur le jeu et les passe-temps au Moyen Âge.
Certains manuscrits sont pédagogiques. Par exemple, La fleur de la bataille, créé à Venise ou à Padoue vers 1410 – une décennie avant la naissance de Jacques – a fourni des instructions étape par étape sur la façon de manier une lance. Pour les mécènes plus intellectuellement enclins, un livre quasi contemporain du nord de la France présentait une suite de problèmes d’échecs qui serviraient encore de bonne formation pour les grands maîtres en attente.
Cependant, comme nous le rappelle une enluminure dans un manuscrit voisin, le jeu au Moyen Âge avait un sérieux distinct des tournois sportifs et d’échecs professionnels d’aujourd’hui.
Réalisé à Anvers en 1464, avec des peintures miniatures exquises de Lieven van Lathem, le Roman de Gillion de Trazegnies raconte l’histoire d’un noble médiéval, son voyage en Égypte, sa chute accidentelle dans la bigamie et sa mort héroïque au combat. Dans la page affichée, ses fils jumeaux s’agenouillent devant le roi de Chypre, vêtus d’une armure de combat, tenant des boucliers avec des emblèmes qui évoquent visuellement le motif en damier d’un échiquier voisin. La mise en miroir est importante car les échecs étaient un jeu utilisé pour enseigner la stratégie militaire et les tactiques de champ de bataille que les jumeaux utiliseraient plus tard dans des combats mortels.
La maîtrise des sports, y compris la joute et la chasse, a également joué un rôle dans la formation des écuyers, offrant une pratique de l’équitation et du maniement des armes tout en informant les choix de la famille royale sur les personnes à aligner à la guerre. Ces poursuites ludiques étaient à la base du statut au Moyen Âge belliqueux et ont fourni une iconographie digne d’un roi, comme l’illustre un psautier latin du 13e siècle montrant un monarque royalement monté sur un cheval blanc tout en pratiquant gracieusement la fauconnerie.
En quelque sorte, le conte de Jacques de Lalaing marque la fin de cette époque. Aussi brave au combat qu’aux joutes, il combattit pour Philippe le Bon dans la Révolte de Gand. En assiégeant le château de Poucques, il aurait rencontré son sort lorsqu’il a été abattu par un boulet de canon.
Alors que les progrès de la guerre rendaient les tournois moins importants en termes militaristes, les sports ont gagné en latitude pour divertir les joueurs et les spectateurs. Vers le 20e siècle, le bordel comportait la menace d’une apocalypse nucléaire et un public terrorisé avait soif de toutes les distractions possibles.
Bien sûr, la distinction n’est pas absolue. Les joutes étaient sans aucun doute divertissantes, les activités sportives préparent toujours les soldats pour le champ de bataille, et les jeux de guerre modernes (y compris ceux qui informent les stratégies de conflit nucléaire) sont directement issus des échecs. Il serait également ridicule de qualifier le sport professionnel de passe-temps ; la renommée et la fortune accordées à LeBron James Lionel Massi dépassent de loin même les récompenses amassées par Jacques de Lalaing. On ne peut nier le travail sérieux que les gouvernements ont déployé pour atteindre la suprématie géopolitique et / ou les affaires sérieuses sous-jacentes aux négociations de parrainage de plusieurs millions de dollars.
Cependant, les manuscrits médiévaux montrent une relation plus fluide entre les activités ludiques et sérieuses. Dans l’imagerie astucieuse de Jacques de Lalaing, le tournoi a des qualités de théâtre, une mise en scène dans laquelle Jacques et son cheval sont des personnages costumés de façon fantaisiste. Jacques porte même une manchette ornée de bijoux et un voile blanc qui lui ont été donnés par des femmes nobles qui regardent l’événement. Le thème de la bataille se superpose parfaitement au drame de l’amour courtois.
L’espièglerie n’a peut-être jamais été plus sérieuse, ni le sérieux plus ludique, qu’au Moyen Âge.